Les Nouvelles News Arnaud Bihel - Jeudi, 26 Mai 2011

La sûreté nucléaire, c'est le premier thème de travail au menu des dirigeants du G8 réunis à Deauville jeudi 26 mai. La thématique s'est imposée à l'ordre du jour après la catastrophe de Fukushima.

Nicolas Sarkozy l'a répété sur la scène internationale, il compte sur le G8, qu'il préside, pour fixer des règles mondiales plus strictes en matière de sûreté nucléaire. Mais Karine Gavand, qui suit pour Greenpace le sommet de Deauville, juge que la démarche du chef de l'Etat n'est « pas sincère ». Pour les ONG, c'est une évidence : la France compte faire de ces règles internationales « un étalon pour vendre l'EPR » - le réacteur français de 3ème génération réputé plus sûr, puisque plus moderne (1). Pourtant, martèle Karine Gavand, « la première leçon qu'on doit tirer de Fukushima c'est que le nucléaire sûr n'existe pas. » Même critique chez WWF. Pour Elise Buckle, elle aussi observatrice du G8, « la France se comporte en véritable pompier pyromane du nucléaire. Elle cherche à tout prix à exporter ses centrales (...) Elle sème les graines de potentiels accidents nucléaires et vend ensuite ses experts pour venir en aide aux pays victimes de catastrophes. »

Stress test à minima

Les anti-nucléaires pointent du doigt une autre facette du « double discours » du chef de l'Etat. Tout en affichant sa volonté « normes internationales de sécurité au plus haut niveau d'exigence », la France (en compagnie de la Grande-Bretagne et de la République tchèque) n'a cessé de faire pression pour réduire la portée des « stress test », ces tests de sécurité prévus sur l'ensemble des 143 réacteurs en activité en Europe.

Ainsi, ils ne prendront pas en compte les risques liés à des attaques terroristes ou des sabotages. Le Commissaire européen, Günther Öttinger, voulait que ces tests, menés à partir du 1er juin, incluent ces risques, il a dû reculer (2). Et pour cause : « Si une centrale, et je parle pour la France, ne passait pas ces tests, elle serait fermée », avait annoncé Nicolas Sarkozy en mars. Dans la mesure où - comme l'Allemagne l'a confirmé - aucun réacteur ne résisterait à la chute d'un avion, cela signifierait la fin du nucléaire.

« Ces tests se transforment, comme prévu, en simple exercice de communication, orchestré par les autorités nationales », constate l'eurodéputé EELV Yannick Jadot.

 Le choix entre deux modèles

 France et Allemagne... voilà les « deux pays qui se singularisent » au G8, analyse Karine Gavand. D'un côté la France, « qui symbolise l'entêtement dans le choix du nucléaire ». De l'autre l'Allemagne, « qui symbolise le changement » en prenant l'option de sortir du nucléaire, sous la pression de l'opinion publique mais de façon réfléchie, et sans conséquence négative pour son économie. « On espère que les pays du G8 vont regarder ces deux modèles, et choisir le bon », résume Karine Gavand.

 La réunion de Deauville, quoi qu'il en soit, n'est qu'une étape. Un séminaire sur ce même thème de la sûreté nucléaire, réunissant une trentaire de pays, se tiendra les 7 et 8 juin prochains à Paris. L'ONU, de son côté, a prévu une conférence à New-York sur le thème de la gouvernance mondiale du nucléaire. Un autre sujet sensible aux yeux de Karine Gavand, qui appelle à réformer l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Une agence qui, à ses yeux, baigne dans un « conflit d'intérêt interne » en raison de sa double mission : promouvoir l'énergie nucléaire, et en même temps la réguler. « Dès lors, elle ne peut pas vraiment jouer son rôle de régulateur. »

 ________________________________________

(1) Un argument développé par Nicolas Sarkozy au début du mois à Gravelines.

(2) L'accord trouvé entre la Commission et les autorités nationales prévoit des tests de sûreté poussés pour vérifier la résistance des centrales nucléaires à des catastrophes naturelles ainsi qu'aux « conséquences de tout type d'accident d'origine humaine ou naturelle ». En revanche, la question des risques liés à des actes terroristes ou des sabotages est dissociée de ces « stress tests ». Elle sera examinée ultérieurement par « un groupe de travail composé par des experts des Etats et des représentants de la Commission ».