La Vidéo de la Journée:
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22 Mai 2011 Mediapart Jade Lindgaard
Disons le net : avant l'accident nucléaire japonais, existait un accord
plus ou moins tacite pour ne pas se déchirer sur le nucléaire. Voire même pour
ne -presque- pas en parler. Le fantôme du Grenelle de l'environnement, et de
son silence sur le sujet, planait samedi au-dessus des têtes de l'assemblée.
L'énergie nucléaire étant un sujet historique de controverses entre écologistes et productivistes, plus ou moins héritiers du marxisme, plus ou moins keynésiens, on pouvait s'attendre à un étalage sanglant de divisions. On assiste en fait à un compte-rendu d'étape de cogitations que l'on sent à la fois sincères et bordées de délicats consensus politiques. « Faut descendre de nos postures, on fréquente les mêmes experts » remarque Laurence Rossignol, chargé de l'environnement au PS. Après Fukushima, ses camarades de la rue de Solférino lui ont « un peu rappelé les communistes après la chute du mur, c'est la fin d'un mythe, le mythe de l'absence de risque du nucléaire ».
Comment avancer à partie de là ? En ne commençant pas par se demander si l'on est pour ou contre la sortie du nucléaire et à quelle échéance (huées dans la salle, riposte immédiate : « Eh non, il n'y a pas écrit la même chose que dans le programme des Verts... »). Mais en établissant de nouveaux axes de la politique énergétique : comment garantir l'accès de tous à l'énergie ?Quels investissements pour la transition énergétique ? Quelle politique tarifaire pour changer les comportements ? Ce n'est pas très loin de la méthode adoptée par Negawatt, l'association d'experts énergétiques qui a conçu (une nouvelle version est attendue pour cet automne) le scénario de référence des écologistes hexagonaux de transition énergétique. « Nous voulons engager la sortie du nucléaire, explique la socialiste, mais le plus important ce n'est pas la date de cette sortie, c'est le contrat de gouvernement pour 2012-2017 ».
C'est
formulé différemment mais pas incompatible avec ce que défend Eva Joly, qui
veut « faire de la sortie du nucléaire le point dur de notre accord de
gouvernement », ou Nicolas Hulot pour qui « à partir de cet
instant, l'objectif de sortie du nucléaire est immédiat ».
A leur gauche, les positions insistent sur l'enjeu d'un renforcement des
services publics et de l'Etat. Et les désaccords se durcissent avec les
précédents, mais forment un pôle idéologique cohérent : pour un service public
de l'énergie, la renationalisation d'EDF, GDF-Suez et Total réclame Martine
Billard, ancienne Verte, aujourd'hui au Parti de gauche, qui défend aussi la « plannification
écologique », les relocalisations de la production et du traitement
des déchets, ou encore la création d'un fond d'aide pour la transition
énergétique et l'embauche des précaires sous statut EDF. Pour le NPA, Vincent
Gay fait la peau du productivisme de la gauche, « une idée avec
laquelle il faut rompre totalement ». Sa « révolution
énergétique » passe par la sortie du nuclaire en dix ans, mais aussi
la transformation des modes de chauffage et d'éclairage, des modes de production
décentralisés, des unités plus petites, des régies locales, la gratuité des
besoins de base, le transfert gratuit des technologies vers le sud...
Seul le PCF, donc, maintient son attachement au nucléaire : « Nous pensons qu'il faut maintenir du nucléaire dans le mix énergétique. Nous ne sommes pas convaincus qu'on peut garantir le droit à l'énergie pour tous et satisfaire les besoins sans nucléaire ». C'est criticable, contestable mais ce n'est pas qu'une position de principe. Le souci social des communistes devra être entendu par les tenants de la sortie de l'atome pour ne pas reproduire l'échec de la campagne pour la taxe carbone. Ce serait toute la vertu d'une discussion politique essentielle- quel modèle énergétique qui concilie justice climatique et justice sociale ?- qui pour se hisser à la hauteur des enjeux devra accepter que le pragmatisme n'empêche pas la radicalité.