8 mars 2011 Alors que se tient aujourd’hui et demain (8 et 9 mars) à Paris une conférence internationale sur la technologie nucléaire, et que doit s’ouvrir le 24 mars le débat public sur le projet d’EPR de Penly, des associations antinucléaires dénoncent le « risque d’accident majeur » que représente le réacteur de troisième génération... selon une source anonyme interne à EDF !

 Après les retards sur les chantiers, les hausses colossales des coûts de construction, les réserves des Autorités de sûreté nucléaires (ASN) de plusieurs pays européens quant à la sécurité du réacteur, ou encore la perte d’un important contrat aux Emirats arabes unis, nouvelle déconvenue pour l’EPR : trois associations, Sortir du Nucléaire, l’Observatoire du nucléaire et le Comité de réflexion, d’information et de lutte antinucléaire (CRILAN) ont reçu et révélé une étude confidentielle d’EDF démontrant, selon elles, l’extrême dangerosité du réacteur.

« Ces documents démontrent que la conception de l’EPR implique un sérieux risque d’accident majeur »« de type Tchernobyl, qui entraînerait la destruction de l’enceinte de confinement et la dispersion massive de radionucléides dans l’atmosphère », avertit le réseau Sortir du Nucléaire. Car « certains modes de pilotage du réacteur EPR peuvent provoquer l’explosion du réacteur ». Et d’ajouter : « Ainsi, dans le but de trouver une hypothétique justification économique à l’EPR, ses concepteurs ont fait le choix de prendre le risque très réel d’un accident nucléaire », et ont tenu l’ASN « à l'écart de ces questions ».

De son côté, EDF, qui n’a pas démenti la provenance des documents, se dit « confiant ». Selon l’électricien, il ne s’agit que de « documents de travail » dont on ne peut tirer aucune conclusion. D’ailleurs, « La validation par l'Autorité de sûreté nucléaire du dossier que transmettra EDF fin 2010 sera un préalable à l'autorisation de mise en service du réacteur Flamanville 3 », assure-t-elle.

 Consulter les documents d’EDF :www.sortirdunucleaire.org

Des révélations embarrassantes

Ces informations tombent plutôt mal pour la filière nucléaire française, alors qu’est organisée à Paris les 8 et 9 mars une conférence internationale sur l'accès au nucléaire civil. Celle-ci, animée par le nouveau directeur général de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique), réunit tous les pays désireux de s’équiper de réacteurs (une soixantaine d’Etats ont manifesté ces dernières années leur souhait d’accéder au nucléaire civil) : une aubaine pour la France (Alstom, Areva, EDF, GDF Suez et Total sont officiellement partenaires de la conférence).

Nicolas Sarkozy, énergique VRP du nucléaire civil, y a ainsi vigoureusement défendu le développement de cette technologie. En commençant par s’en prendre aux militants anti-nucléaires : « Les idéologies de la décroissance sont des idéologies égoïstes qui veulent maintenir les pauvres dans la pauvreté », a-t-il lancé. Puis il a présenté l’atome comme le seul moyen de lutte efficace contre le réchauffement climatique, avant de déplorer que la Banque mondiale, la BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement), et les banques de développement mondiales ne financent pas les projets nucléaires civils. « Je propose donc et j'appelle tous les pays qui partageraient cette position à nous rejoindre pour que toutes les énergies décarbonées puissent être financées par les crédits de CO2 », a-t-il ajouté.

Autre volonté du chef de l’Etat : créer un institut international de l’énergie nucléaire en France, qui abritera une Ecole internationale du nucléaire sur deux sites : à Saclay, et à Cadarache. « Il concentrera les meilleurs enseignants et chercheurs pour offrir une formation de très haute qualité », a-t-il déclaré. Pour Charlotte Mijeon, porte-parole du réseau Sortir du Nucléaire, « cette conférence est proprement scandaleuse car on sait très bien que posséder la technologie nucléaire civile est un paravent idéal pour se doter du nucléaire militaire ».