7 avril 2011 Par HerBiVoRe

Le groupe nucléaire public devrait déposer dans les prochains jours à l’AMF une demande de conversion de ses certificats d’investissement en véritables actions, selon la presse économique. Areva espère que la conversion sera réalisée d’ici au 30 juin.

Techniquement, cette cotation permettra aux actionnaires actuels (l’Etat, le CEA, la CDC, EDF et le fonds koweitien KIA) de céder des titres à terme s’ils le souhaitent, et ouvrira la voie à une nouvelle augmentation de capital, la deuxième après l’injection en décembre dernier de 900 millions ä par l’Etat français et un fonds koweitien, qui détient aujourd’hui 4,8% d’Areva.

C’est justement ce fonds souverain, KIA, qui a exigé en entrant au capital d’Areva (à hauteur de 4,8%), que le groupe soit coté en Bourse avant le 30 juin. Si la cotation d’Areva n’est pas réalisée avant cette date, l’Etat français devra déboursé 600 millions ä à KIA…

Cette privatisation à marche forcée de toute la filière énergétique (après Suez, EDF, GDF) apparaît d’autant plus surréaliste et décalée qu’au Japon, l’hypothèse d’une nationalisation de Tepco, qui fournit un tiers de l’électricité du pays, fait l’objet d’un véritable débat public.

Patronne Areva - Anne LauvergeonSelon le quotidien Yomiuri, certains membres du gouvernement ont proposé un plan en vertu duquel l’Etat prendrait une part majoritaire au sein de Tepco, et l’aiderait à verser des indemnisations pour les dégâts provoqués par l’accident nucléaire. On l’a appris récemment, le site de la centrale et ses 6 réacteurs n’étaient plus assurés depuis août 2010. La couverture ayant été jugée trop chère par l’opérateur de la centrale…

« L’une des premières leçons que l’on peut tirer de la catastrophe de Fukushima est que la dérégulation du secteur de l’énergie n’est pas sans effets sur la sécurité de l’exploitation du nucléaire civil pour la production d’électricité. Ainsi, chaque jour apporte son lot de révélations sur TEPCO l’exploitant de la centrale de Fukushima : fraudes à répétitions (plus de 200 rapports d’inspection falsifiés dans les années 80-90, ce qui avait conduit au départ de toute la direction en 2002 et la fermeture de Fukushima pendant un an), Fukushima et ses six réacteurs nucléaires plus assurés depuis août 2010 ; manquements dans la sécurité du site en 2011 (rapports de contrôle maquillés : TEPCO avait assuré aux autorités, avant la catastrophe, avoir vérifié une trentaine de pièces, alors que c’était faux) ».

Et de citer l’exemple d’EDF « passé d’une culture du zéro risque à une culture du résultat » et son corollaire, la montée en puissance du concept de « gestion du risque ».

« Ainsi, des investissements de sécurité avaient été reportés dans le temps par l’ancien président d’EDF Pierre Gadonneix car jugés pas très rentables, Henri Proglio se voyant contraint de les faire en catastrophe à coût élevé à son arrivée. Pour citer un autre exemple, le directeur de la central de Penly a reçu un blâme pour avoir pris sur lui d’arrêter un réacteur pour réparer une fuite sur une valve du circuit primaire au détriment de la production. Au-delà de l’anecdote, le problème posé est structurelNon, décidément, nucléaire et privatisation ne sont pas conciliables » conclut Thierry Le Pesant (CIRED).